dimanche 24 décembre 2006

Mon Algérie à moi Dominique

CHERCHELL



Le Port de Cherchell

Pour atteindre le petit port de Cherchell il faut parcourir environ 100 kilomètres à l'Ouest d'Alger en longeant la côte littorale. ----









A l'époque romaine la ville avait pris le nom de Juliae Caesaréa. Elle existait déjà au IVème siècle avant Jésus Christ et s'appelait Iol. C'était un comptoir phénicien de médiocre importance. Plus tard, et après l'époque carthaginoise elle devint le centre de la Maurétanie Césarienne et son rayonnement s'accrut. Sa population fut estimée à 100 000 personnes à l'époque de Juba II, souverain indigène, épris de culture gréco-latine, artiste et littérateur. Comme l'écrivit Louis Bertrand dans son ouvrage "Africa" : "Juba nous intéresse comme le personnage le plus représentatif de son époque et de sa patrie. Il symbolise à merveille ce que fut l'Afrique sous la domination romaine".










----Le site de collines, très verdoyantes, de Cherchell, sa position en surplomb sur la Méditerranée, son petit port surtout destiné à la pêche et au cabotage, en font un lieu très agréable.----I1 subsiste quelques ruines de l'époque romaine. Parmi les vestiges qui nous ont permis de comprendre la topologie des lieux, on peut citer, outre quelques riches maisons, les grands thermes, le théâtre et la place romaine où subsistent des colonnes et une fontaine ayant fière allure.




Cette place, à la belle saison est ombragée par de magnifiques Bellumbras, arbres majestueux s'il en est.















Un aqueduc gigantesque irriguait Cherchell et sa région, long de 28 kilomètres, il y amenait les eaux du Djebel Chenoua. Bref, cette cité était très prospère à l'époque.
Les Romains restèrent plus de quatre siècles en Afrique du Nord.


Le Chenoua




Cependant, la décadence progressive de l'empire romain favorisa une période de soulèvements, réprimés péniblement jusqu'au moment où survint l'invasion des "Vandales", peuple germanique venant d'Espagne et ayant abordé l'Algérie par l'Ouest.----Les vandales ne se privèrent pas de piller Cherchell. Les débris de la civilisation rom aine semblaient à la veille de disparaître.
Ils furent sauvés pour un siècle encore par l'intervention des Byzantins en 533. Ces derniers détruisirent le royaume vandale.----Puis vinrent les invasions arabes. C'est en 647, quinze ans après la mort de Mahomet que les Arabes pénétrèrent en Afrique du Nord. Par la suite, au fils des années les berbères furent islamisés : ce fut surtout le cas des habitants des villes, de Cherchell en particulier.
En 1492, la ville reçut un apport de musulmans réfugiés d'Espagne à la suite de la chute de Grenade et de la "Reconquista" espagnole.----Puis au cours de la période qui suivit, ce fut l'arrivée des Turcs qui s'installèrent en Algérie.----Cette présence modifia quelque peu l'aspect politique du pays et fut à l'origine de la guerre de course sur mer, avant que ne débarquent en 1830 les Français, qui y oeuvrèrent, à l'exemple des Romains, jusqu'en 1962.

C’est à Cherchell que j’ai passé quinze mois de ma vie.


Printemps 1970 :

Nous sommes mariés depuis un an. Patrick doit effectuer son service militaire, car son sursis prend fin, mais il ne veut ni porter l’uniforme ni manipuler un fusil : il ne veut pas être soldat.
Une solution existe : effectuer son service militaire au titre de la coopération dans un pays en voie de développement, mais se présentent de nombreux candidats et il y a peu d’élus , les médecins et les ingénieurs étant prioritaires . La chance nous sourit, nous rencontrons à l’hôpital une personne connaissant personnellement monsieur Edgar Faure alors ministre des affaires étrangères, elle nous propose de lui faire parvenir le dossier de Patrick, nous acceptons immédiatement .De nombreux pays sont proposés, en Asie, en Afrique, au Maghreb .Nous mettons une croix en face chaque pays sauf un : Algérie .pourquoi ? Une vague crainte, l’indépendance de ce pays est très récente, nous sommes tous marqués par la guerre d’Algérie bien que notre génération n’y ait pas participé.

Début de l’été 1970
La réponse est là.

Départ pour ALGER début septembre car un poste de Technicien de Laboratoire est libre à CHERCHELL .Nous nous précipitons sur l’Atlas pour savoir ou se trouve Cherchell, désert, montagne, bord de mer ? Nous sommes ignorants. Cherchell est un petit port de pêche à cent kilomètres à l’ouest d’Alger. Le bonheur…vivre au bord de la mer ! bien sur j’envisage immédiatement d’accompagner Patrick.
Nous mettons nos craintes de coté et nous nous préparons à l’aventure. Patrick va partir le premier et je le rejoindrai deux mois plus tard après avoir demandé au CHR une disponibilité et préparé les cantines.
L’heure du départ a sonné, Patrick rejoint d’autres coopérants à Marseille puis s’envole en direction d ‘ Alger.Pendant quelques jours, les coopérants sont hébergés à EL HARRACH .Là on leur donne leur affectation, quelques conseils et chacun doit rejoindre son poste par ses propres moyens.Patrick loue les services d’un taxi pour se rendre à Cherchell et se rend directement à l’hôpital afin de rencontrer le directeur .
Monsieur BOULAZREG .Celui ci n’attend personne ! Tous deux se rendent au laboratoire (fermé depuis la guerre), il y a quelques pipettes, mais pas de matériel pour travailler !Patrick est déçu.Il fait connaissance de deux médecins coopérants : Denis LELIEVRE et Michel CARLIER .
Michel propose à Patrick de loger chez lui car la chambre de l’hôpital est une vraie cellule Grâce à Michel, Patrick fait connaissance de deux personnes qui seront toujours très présentes pendant tout notre séjour : Alphonse GEORGER, curé de Cherchell, professeur au collège et Max DRILLIEN. Max à 63 ans, il était intendant à l’académie Militaire lorsque l’armée française était là. Au moment de l’indépendance, il est resté, pourquoi ?
Parce que :
« En Bretagne, toutes mes petites amies sont grand-mè re Maintenant ! » disait-il avec humour. Journaliste de profession ,il donne des cours à de jeunes élèves ,les aide à poursuivre leurs études .Il peint aussi mais ne mélange aucune couleur,Max est un original qui sait faire rire lorsqu’on est un petit peu morose,et oui !
Il a été professeur d’optimisme, c'est aussi un ami de la femme de Saint Exupéry,(Consuelo) , qui vient le voir de temps en temps.



Patrick est allé rendre visite à Monsieur MEKLATI, Directeur du collège.Il y a peu de professeurs Algériens et les enseignants Français sont les bienvenus.Je pourrai obtenir un poste en sciences naturelles.
Fin octobre 1970 :


Je pars rejoindre PatrickPapa va m’accompagner à Marseille car je descends en voiture, la Dauphine partira par ferry ; et moi par avion ; ce sera mon baptême de l’air. L’avion est une Caravelle, je suis un petit peu angoissée mais le vol se passe bien. Les passagers, heureux d’arriver à Alger se bousculent pour descendre ; il faut attendre, je suis la dernière à descendre de l’avion Un comité d’accueil est là : Patrick, Michel, Alphonse ! Je suis émerveillée et intriguée
.Car tout est nouveau pour moi ;
Max est là chez Michel et c’est un accueil chaleureux que je reçois !Patrick m’offre une première soirée à l’hôtel CESAREE car demain nous allons loger à l’hôpital en attendant d’avoir un chez nous !En novembre, à Cherchell, les soirées sont douces encore et nous aimons aller le soir nous promener sur le port, à la pointe de la jetée d’ou l’on aperçoit les colonnes romaines lorsque la mer est calme, ou sur la grande place bordée de Bellumbras. Une ou deux fois nous entrons dans un café boire un thé à la menthe ou une orangeade ; au moment de payer, le serveur dit : « c’est réglé, quelqu’un a payé pour vous ! » nous sommes étonnés, nous ne savons pas qui est ce quelqu’un, c’est gênant, nous ne pouvons même pas dire merci !C’est très touchant, je découvre l’hospitalité du MAGHREB…….
Je rejoins le collège ou un poste d’enseignante en sciences naturelles est disponible.Il y a plusieurs classes de troisième tant au collège de garçons qu’au collège de filles. J’ai 23 ans, certains élèves ont dix huit ans, portent la moustache, mais j’accepte. Je rencontre plusieurs enseignants européens , Eliane Lelièvre,la famille Travers,Guérit Tiberghein , il y a aussi des professeurs arabisants,certains sont sympathiques :Je me souviens de ce professeur d’anglais Palestinien qui me saluait toujours d’un signe de tête puisqu’il y avait la barrière de la langue entre nous , mais je me souviens aussi de ce professeur syrien pour qui j’étais transparente,je n’existais pas……
1er novembre :

Chaque week end nous partons explorer les environs. Aujourd’hui, au pied du CHENOUA je prends le dernier bain de mer de l’année. Nous visitons les ruines de TIPASA si belles dans ce décor naturel somptueux !

Puis GOURAYA, cette petite crique si reposante.



Nous passons souvent nos soirées chez Alphonse au presbytère. Il reçoit beaucoup de jeunes élèves, des Africains venus faire leurs classes à l’académie militaire Algérienne, c’est agréable de rencontrer d’autres cultures.Le monde s’ouvre à moi, c’est une deuxième naissance, j’étais une petite fille bourgeoise et gâtée, sans soucis, je vais être confrontée à une autre civilisation et côtoyer des gens à la vie moins dorée que la mienne.
Nous faisons connaissance de Djamel qui est instituteur dans le bled , il est très gentil et il vient souvent nous rendre visite pour parler, échanger des idées, nous expliquer les coutumes locales, cela nous évitera de faire des impairs.

Ça y est , nous déménageons , deux cantines et le mobilier de première nécessité prêté par l’hôpital ; une petite maison nous est attribuée à la sortie de la ville, elle a une particularité : c’est l’ancien Bordel de la ville et nous allons habiter le logement de la tenancière
Il faut traverser la cour où existent toujours les chambres …sans porte. Depuis notre logement on accède à une immense terrasse avec vue sur la mer.


c'est le début de l’hiver, je me dépêche de rentrer avant la tombée de la nuit car j’ai peur toute seule.
Il faut traverser la cour pour accéder à l’étage…et Patrick rentre plus tard !
J’ai même eu un après midi la visite du Directeur et de l’Econome. Que venaient-ils faire ? Je ne le saurai jamais, heureusement, cette après midi là Sonia et Gherit étaient venus passer l’après midi près de moi. Guérit les a reçu, j’étais très mal à l’aise et peu rassurée. , Chaque jour je travaille soit au centre ville soit à la sortie de la ville près de la porte de Ténès





Là Je rencontre une jeune femme professeur qui m’interroge : « vous n’avez pas peur là ou vous habitez ? Si, "un peu ".Cette dame m’explique que son oncle a un logement libre dans sa villa et qu’en général il ne la loue qu’à des coopérants français.
Si cela m’intéresse, je peux aller le voir de sa part ; je ne me le fais pas dire deux fois et je rencontre la famille AKAM.



Ils habitent le quartier chic de Cherchell, près de l’avenue de la révolution, cette belle avenue garnie de palmiers.Leur voisin le plus proche est le colonel YAYAOUI, responsable de l’académie militaire .Je ne garde pas un bon souvenir de ce voisin particulier, froid, hautain, qui n’a jamais daigné répondre à notre bonjour.

Le logement proposé se trouve au rez de chaussé, la famille habitant à l’étage.


Tout de suite je sais que nous serons en sécurité près d’eux .C’est donc avec grand plaisir que nous déménageons .Le logement est grand : une cuisine, une chambre, et deux petites pièces qui serviront de chambres à nos nombreux visiteurs.



Avec rien nous effectuons quelques décorations, un lampion en papier, des lampes de chevet à base de boite de camembert….
Nous ne sommes plus isolés, c’est rassurant !

Djamel continue à nous rendre visite et un soir il arrive accompagné d’un de ses amis militaire car il souhaite nous le présenter ; je suis inquiète .
Aman CHALABI est Lieutenant dans l’ALN.Il connaît bien Paris, y ayant vécu jusqu’à l’age de vingt ans. Mais avec les prémices de la guerre, on l’insulte, on lui conseille de rentrer chez lui, c’est ce qu’il fait et s’engage pour défendre son pays et son indépendance.
Mais c’est un francophile et nous sommes en phase avec lui.Il deviendra un ami fidèle.


La fin d’année approche, c’est la première fois que nous allons passer Noël loin de notre famille.Le seul lien avec elle est le courrier, le téléphone n’est pas encore un bien de consommation courante et aucune des deux familles ne le possède.
Alphonse nous invite à passer Noël chez lui en compagnie de Max, Michel, Sonia et Gerrit. Nous allons écouter la messe de minuit dans la chapelle, quelques Congolais chantent dans leur langue natale, c’est magique, même les non croyants ressentent un petit quelque chose.

25 décembre 1970:


Nous sommes tous endimanchés, Alphonse nous fait déguster une choucroute, recette venant de son Alsace Lorraine bien lointaine.
Nous sommes allés voir la crèche chez Max : Une crèche traditionnelle avec le petit Jésus, Marie, Joseph, les rois mages, les animaux, mais cependant unique car chaque année la crèche s’agrandit.
Max façonne de nouveaux santons……représentant les nouveaux coopérants !Nous sommes donc dans la crèche ! La fin d’année se passera avec les TIBERGHEIN en faisant une partie de Monopoly,le jeu unique est fabriqué par nos soins ; il y a l’avenue de la Révolution,l’avenue BOULAZREG….etc. j’ai apprécié cette fin d’année ou l’argent n’a pas été le moteur .
Nous apprécions le climat agréable de Cherchell.Un vendredi de janvier nous organisons un pique-nique aux trois îlots situés au pied du Chenoua, il n’y a que nous sur la plage et il fait même trop chaud.Un autre vendredi (c’est le jour de repos en Algérie) nous allons à Chréa, dans le mont Djurdjura et nous marchons dans la neige .Par le passé il y avait une station de ski.En Algérie on peut être le matin au bord de la mer, le midi dans la neige et le soir dans le désert. Nous nous Plaisons dans notre nouvelle demeure et j’aime bien bavarder de temps en temps avec monsieur et madame AKAM .
Notre propriétaire est bijoutier et possède une boutique sur la place ; cette famille a trois enfants :Kamel, instituteur dans le bled et qui a mon age, Samia qui va passer son bac et qui écoute en boucle « Pour un flirt avec toi « de Michel Delpech , et Mahmoud qui est adolescent et va à l’école.Madame AKAM fait partie d’une famille maraboutique, la famille EL GHROBRINI et une fois j’ai eu le privilège de l’accompagner visiter son ancêtre .Le marabout est enterré dans une petite maison blanche au toit arrondi.Des offrandes lui sont apportées ; cet ancêtre est vénéré pour ses qualités morales et religieuses.
J’ai été très impressionnée par Madame AKAM et j’ai un profond respect pour cette petite dame si croyante et si gentille avec nous.
A Cherchell je ressens une douceur de vivre, nous avons le temps d’aller travailler, d’aller au marché, de voir nos amis. Nous ne sommes pas bousculés, pas de grandes distances en voiture, pas de pollution, pas d’envies matérielles puisqu’il n’y a que le strict indispensable dans les magasins.
Nous côtoyons souvent Sonia et Gerrit ainsi que leur petit garçon de trois ans Jorrit. Gerrit est professeur d’anglais au collège .Sonia est une artiste ; elle fait de merveilleuses reproductions de Druillet à l’encre de chine, brode, fait de la couture, s’habille cool en robe kabyle, j’adore…
Avec eux, même les gens moins dynamiques sont stimulés, donc je tricote, je bricole….aussi.



Le soir de Noël chez Alphonse*

Les vacances de février approchent, nous avons décidé d’aller à Ghardaïa avec Denis et sa femme Eliane (professeur de français).Nous sommes en Dauphine et eux en trois chevaux.

C’est à six cents Kms de Cherchell : Direction Blida puis traversée du « ruisseau aux singes « ; nous traversons cette montagne où de nombreux singes vivent en liberté, ils ne sont pas sauvages et viennent près de nous.
Nous arrivons sur les hauts plateaux.Ce sont des déserts de pierre.Puis traversée de Laghouat. Les dunes de sable sont encore loin Peu de circulation, seulement quelques pétroliers et leurs camions.
Il faut malgré tout faire attention car parfois des troupeaux de chèvres et de moutons venus de nulle part traversent la route asphaltéeLes dunes de sable apparaissent peu à peu, des bouquets de palmiers signalent des mini oasis. Aux pieds des palmiers, déguster du pain et des sardines à l’huile dans un tel décor cela vaut un festin !
Je me souviens….au fond de cette mini oasis existait une petite maison faite en roses des sable, et chaque jour, son propriétaire, aidé de son âne, remontait le sable qui glissait et aurait englouti sa maison.
L’arrivée à Ghardaïa m’a procuré les mêmes sensations que l’arrivée à Grand canyon.On roule, on roule puis brusquement c’est la cassure de la terre avec au fond la ville de Ghardaïa, maisons blanches et bleues cachées au milieu des palmiers.En fait il y a une couronne de cinq oasis :Ghardaïa, Beni isguen la ville sainte, Elateuf, Bounoura, Mélika et qui constituent le Mzab.
Les mozabites sont tous semblables : ils sont très myopes, portent des verres très épais et une grande barbe. Nous ne rencontrons que peu de femmes, par contre nous observons au cours de nos promenades au travers des ruelles des fenêtres garnies de moucharabiehs. En février, un petit pull suffit pendant la journée par contre la nuit il fait froid, très froid… Nous avons décidé de nous lever très tôt (4 heures ?) pour assister au lever du soleil.
Nous montons sur la colline afin de découvrir la ville dans son ensemble ; il fait froid, nous nous servons de nos serviettes de bain comme un foulard ; là j’ai vécu quelque chose de magique que les mots ne peuvent pas décrire !
L’apparition du soleil au dessus du minaret de la mosquée et l’appel du muezzin ; on oublie tout, un coq chante, au loin on aperçoit un homme en burnous assis sur son âne ;Le temps s’arrête, j’ai l’impression d’être à l’époque de la bible, aucun bruit, on voudrait que ce moment dure longtemps…
Je suis retournée plusieurs fois au Mzab ; le grand tapis à rayures a été acheté sur la place du marché à Beni Isguen , en fait c’est une tenture de mariage qui, normalement, tapisse une tente nomade.
La taille des clés de portes de maison m’a surprise, elles mesurent au moins vingt centimètres. Beni isguen ferme les portes de la ville le soir et aucun étranger ne peut y rester la nuitLa vie continue, chacun essayant d’effectuer son travail le mieux possible.

Mon nouveau métier d’enseignante me plait beaucoup mais c’est parfois difficile car je ne connais pas l’arabe et le peu de différence d’âge entre certains de mes élèves et moi pose problème.
Je pense qu’ils me jugent trop sévère, mais je n’ai pas le choix, il faut tenir la barre. Mais en fin d’année, une lettre très gentille et très sincère d’un élève a été ma récompense, il m’avouait m’avoir mal jugée.



Patrick au laboratoire est accompagné d’un jeune homme nommé Sid Ali, c’est un très gentil garçon qui nous fait connaître sa famille.



Nous fréquentons aussi bien des amis européens que locaux ;Une famille pied noir .

La famille Travers n’a jamais quitté l’Algérie, parents et enfants sont enseignants ;Les garçons sont pêcheurs de langoustes et chasseurs de sanglier ; un soir ils ont invité Patrick à la chasse ; ils chassent la nuit, éclairés par une torche ; le pays est surpeuplé de sangliers qui détériorent les cultures, donc cette chasse est tolérée. Une laie a été tuée et ramenée chez Travers. Le lendemain, avec la belle fille Travers il faut découper le sanglier en morceaux afin de le mettre au congélateur ; J’ai dû emprunter des couteaux chez le boucher. Ce fut un travail très difficile pour des néophytes en la matière ; par contre le rôti de sanglier fut très apprécié car cela faisait plus de six mois que nous n’avions pas mangé de porc.
Patrick ne renouvellera pas cette expérience car il n’aime pas la chasse et tuer des animaux lui est insupportable.Avec pâques, nos premiers visiteurs arrivent, ce sont les parents de Patrick.
Nous allons les chercher à l’aéroport DAR EL BEIDA d’Alger. Je suis en vacances scolaires et Patrick a quelques jours de congé, nous allons en profiter pour visiter quelques sites, mais tout d’abord c’est le jour de Pâques et Alphonse prépare la messe dans la chapelle attenante à sa maison. Cela va être une messe peu ordinaire puisque un invité très connu sera présent : l’évêque d’Alger, Monseigneur Duval, l’évêque félon aux dires des pieds noirs, car il a pris position pour l’Algérie algérienne. Mamy et moi-même assistons à la messe, Mamy est très impressionnée, j’avoue moi aussi.
Puis nous partons faire un pique-nique dans la crique de Gouraya, nous avons emporté le canoun, le charbon de bois et nous dégustons des brochettes. La ballade suivante nous conduit à Tipasa, ancienne ville romaine.
Tipasa est classée au patrimoine de l’humanité, elle est en très bon état de conservation. nous descendons au bord de mer en empruntant l’allée centrale bordée d’énormes pots ventrus en terre , ces pots devaient contenir les réserves d’huile ou de nourriture ; des sarcophages sont ouverts, vides bien sur ! Nous les essayons, les occupants étaient de petite taille !
La vue sur la mer et le Chenoua est paradisiaque ; ils avaient très bon goût ces romains !Aman vient nous rendre visite régulièrement ; on discute, on refait le monde …ou l’Algérie ; on imagine ensemble qu’elles seraient les meilleurs solutions pour réussir « Prenez modèle sur nous en France ! » clame le père de Patrick !
Étonnement et surprise de la part de celui qui a fait partie du FLN et a souhaité le départ de la France coloniale mais qui est très francophile néanmoins.
C’est un manque de tact d’émettre de tels propos !Ce printemps verra la disparition de madame Travers qui est tuée dans un accident de voiture.La semaine est terminée, les prochains visiteurs seront René et Martine Guillien (René a été assistant au laboratoire et a été témoin à notre mariage). Avec eux, nous visiterons les Aurès ; les villages sont enfouis dans le fond des canyons ; Je sais que c’est là que la rébellion a commencé nous allons faire étape à Mchounech, là il y a un hôtel tenu par une française ; nous arrivons assez tard, le trajet fut difficile, il faisait très chaud.Nous entendons couler l’eau dans l’oued, sans réfléchir, nous nous baignons, y avait t-il risque de bilharziose ?... Nous prenons possession de nos chambres, mais impossible de dormir tant il fait chaud !
La propriétaire nous conseille de dormir sur le toit, nous grimpons donc avec nos matelas mais c’est toujours aussi difficile de dormir !là quel spectacle, avoir la tête dans les étoiles ! Seul un pétrolier dort du sommeil du juste.
De temps en temps on entend le bruit d’une canette de bière que l’on ouvre : nous avons été bien imprévoyants ! Nous attendons le lever du soleil .c’est la première fois de ma vie que je déjeune aux aurores avec une bière !
L’hôtelière est étonnée, il fallait venir vous servir dans le frigo la nuit, ici, on fait comme cela, et on règle le lendemain ! Une nuit complète à avoir soif alors qu’en bas de l’échelle dans le frigo il y avait de nombreuses canettes ! Je crois que j’ai gardé inconsciemment cette expérience en mémoire et que la bière est la boisson désaltérante n° 1 en période de grande chaleur !
A Tipasa existe un club de vacances et Sid Ali y possède des chevaux.

Martine adore les chevaux, donc nous partons voir les équidés : ce sont des petits chevaux arabes très rapides.Se trouve là un bellâtre italien qui visiblement veut nous épater, il monte un cheval, mais visiblement il ne sait pas que c’est un cheval de fantasia qui part au galop dès que son cavalier se soulève ; après un départ fulgurant, le cavalier est éjecté, nous sommes inquiets mais il se relève sans dommages ; à posteriori, nous avons bien ri !


Quatre médecins bulgares sont arrivés à Cherchell ; un gynécologue le un oto-rhino le Docteur Moustafov,

Ils sont accompagnes de leur femme et de leurs enfants.













Le Docteur Sémianov,










Les deux autres médecins sont des femmes, elles sont venues seules, leurs maris respectifs étant restés en Bulgarie. Ils viendront rejoindre leurs femmes pour des vacances.Eux aussi disparaîtront dans un accident de voiture.
Il est très dangereux de circuler en voiture car le code de la route n’est pas un problème pour de nombreux conducteurs, circuler la nuit n’est pas conseillé car les bicyclettes sont rarement éclairées….nous avons rencontrés plusieurs fois ces différentes familles, toutes très gentilles, mais toutes étaient persuadées que les autres bulgares étaient des espions à la solde de leur gouvernement !
C’est déstabilisant ; vive la démocratie !


Juin nous a amené d’autres visiteurs,




Léo et Germaine sont arrivés par bateau et nous attendent devant la grande poste.
Avec eux aussi nous avons sillonné le Mzab, fait du pique-nique sur la plage…je garde un très bon souvenir de leur passage.
Michel Carlier est revenu à Cherchell en voyage de noce et nous avons fait connaissance de Marie Thérèse.

Cette période fut aussi une des moins heureuses de mon séjour en Algérie car mon grand père est décédé, et je n’étais pas là pour l’accompagner ; C’était quelqu’un de bon qui avait beaucoup d’affection pour moi.
Lui aussi avait connu l’Algérie dans sa jeunesse puisqu’il était venu travailler à Blida.


A l’hôpital, Patrick fait connaissance de deux médecins belges qui comme lui ont préféré venir quelques mois à Cherchell en guise de service militaire ; un flamand : Robert et un wallon : François.

Robert est paraplégique et ne se déplace qui en chaise roulante, il a perdu l’usage de ses jambes lors d’un voyage aux Etats Unis, en faisant du « stop » ; c’est difficile pour lui de travailler à l’hôpital car aucune concession ne lui est faite vu son handicap.
Ils viennent souvent passer la soirée en notre compagnie et, heureusement, jeunesse et gaieté occultent momentanément nos soucis.



Michel Carlier est parti depuis février et les Lelièvre quittent l’Algérie.








Juillet 1970 :


Mon frère Hugues et Florence la sœur de Patrick viennent passer leurs vacances près de nous ; ils ont seize ans tous les deux ;

Maman qui est très fatiguée physiquement et moralement après le décès de mon grand-père décide de venir aussi .
Papa restera, il ne veut pas venir, il connaît Alger dit-il pour y être venu avec le Général de Gaulle pendant la deuxième guerre mondiale.
Mamy Mado accompagnera maman quelques jours.
Nous allons souvent à la plage mais les ballades dans le sud sont exclues tant il fait chaud dans le Sahara l’été. A Cherchell, il fait très chaud aussi, nous sommes de bons clients pour l’épicier car Patrick nous a interdit de boire de l’eau du robinet à cause des gastroentérites et du choléra.
Hugues a sympathisé avec Sid Ali et parfois il va passer un moment vers lui dans son magasin. Hugues est très bronzé, ses cheveux noirs sont bouclés, on le prend quelquefois pour un gars du pays ! Florence est amoureuse de Sid, il est vrai que c’est un jeune et beau garçon. Nous profitons tous les jours de la plage et chaque soir ou presque c’est la fête avec les uns ou les autres.
Mais le ciel commence à s’assombrir pour Patrick, il y a des cas de choléra dans le Sahara ; L’hôpital veut l’envoyer dans le sud, mais ou et combien de temps ?
Aucune réponse ;

Patrick a peur pour sa santé car il est maigre et peu costaud, il refuse :

La sanction est immédiate, il est démis de ses fonctions par le ministère de la santé algérien ; il se rend à l’ambassade de France à Alger ; les coopérants militaires sont détachés et au service de l’état algérien: la seule possibilité est le rapatriement sanitaire au Val de Grâce, hôpital militaire parisien.
Patrick est inquiet, que faire ? Toute la famille est à Cherchell ; il prend rendez vous à l’hôpital Maillot auprès d’un psychiatre français, celui ci lui donne un traitement antidépresseur et, miracle, il connaît personnellement le ministre algérien de la santé ;Le cas de Patrick sera définitivement réglé, il sera en arrêt maladie jusqu’à son départ en France au mois de novembre.

Patrick est anéanti par ses médicaments et passe ses journées à dormir.
La vie à Cherchell est peu chère, nous ne dépensons rien à part la nourriture.En travaillant une année scolaire j’ai pu économiser afin d’acheter une voiture (un coupé 304) que je fais livrer à Alger. A posteriori, ce n’était pas une bonne idée car c’est un manque de tact évident de notre part vis à vis du peuple algérien qui nous a accueilli !
Nous partons tous à Alger, Hugues, Florence, Maman, Patrick et moi .

Je n’avais pas compté avec la lenteur de la bureaucratie du port, Nous sommes obligés d’attendre le lendemain, il va falloir trouver un hôtel. Aucune chambre de libre car il y a un congrès et les hôtels affichent complets ; Que faire ? Dormir sur un banc en attendant le lendemain ! Nous sommes en septembre et il fait encore très bon mais cette situation n’est pas très confortable et nous échangeons des mots avec Patrick.
Tout en déambulant dans la rue quelqu’un nous accoste : « puis-je vous parler ? Il me semble que vous avez un problème, je pourrais peut-être vous aider à le résoudre. » Patrick est bougon, malgré tout il lui raconte notre mésaventure.
Ce monsieur loge à l’hôtel et nous propose de le suivre ; nous traversons la casbah.Là encore aucune chambre de libre ; j’entends le monsieur parlementer en arabe, puis il nous dit « c’est réglé, je vous laisse ma chambre, un deuxième lit va être installé ; vous allez pouvoir passer la nuit ici et demain matin, je viendrai prendre le petit déjeuner avec vous ; » « et vous, où allez vous dormir ? » « Ne vous inquiétez pas, à demain ! » .

Nous avons passé une bonne nuit, fatigués par ces petits soucis ; le lendemain matin nous avons souhaité savoir ou il avait passé la nuit : « dans une cellule au commissariat, j’ai des amis policiers »….Nous avons remercié chaleureusement ce monsieur et en le quittant il nous dit « je veux que vous gardiez un bon souvenir de l’Algérie ».

M
erci monsieur l’algérien pour votre belle leçon d’hospitalité ; je pense avoir retenu et modestement appliqué ce que vous m’avez transmis….
Mais l’heure du retour a sonné et Florence doit rentrer ; départ plus que problématique puisqu’il ne faudra pas moins de trois allers-retours sur Alger pour embarquer enfin ! La première fois, arrivée quelques minutes en retard, l’embarquement n’étant pas terminé, mais portes closes ! La seconde fois le billet ne correspondait pas à un vol passager mais à un vol fret ! Discussion : va t elle partir dans le cockpit avec le pilote ?
La troisième tentative sera la bonne.



De nouveaux visiteurs vont venir égayer notre fin de séjour.
Tout d’abord arrive un couple de coopérants belges, Nanette et Jean Claude.





Jean Claude vient effectuer également son service militaire comme enseignant : ils logent à l’hôtel.
Nous leur proposons de les héberger chez nous car il est difficile de trouver un logement à Cherchell, les jours et les semaines passent et ils sont toujours là …
Nicole et Françoise doivent arriver en octobre, nous allons mettre des matelas par terre car je ne peux pas renvoyer Nanette et son mari à L’hôtel.
Nicole et Françoise sont arrivées les bras chargés de victuailles, saucisson, cassoulet ….tout ce que l’on ne trouve pas ici ; Nous sommes heureuses de nous retrouver, elles nous donnent des nouvelles des amis, des collègues du laboratoire…
Il faut penser au repas car nous sommes six à table.
J’envisage un plat d’œufs durs nappés de sauce aurore ; tout en cuisinant nous plaisantons, Nanette se joint à nous.Son mari n’apprécie pas qu’elle participe à notre joie et la rabroue, mais qu’importe ! Puis nous passons à table.
Nous sommes heureuses d’être ensemble et nous continuons de plaisanter Tout à coup on entend : Nanette, arrête ! »
Puis Jean Claude devient blanc et d’un seul coup retourne la soupière d’œufs sur sa tête !!! Nous sommes stupéfiés, interloqués ; shampoing aux œufs !
Heureusement, Nanette, très digne, s’éclipse.

Patrick attrape Jean Claude par le col, le sermonne et lui conseille de se calmer sinon c’est la porte ! Le couple disparaît dans sa chambre et notre repas aussi !
Le cassoulet apporté par nos amies est le bienvenu ; Nicole est scandalisée, comment peut on en arriver là après deux mois de mariage !
Quelques jours plus tard le couple infernal obtient un logement et déménage, ouf ! Avant le départ de mes amies un méchoui a lieu dans la campagne, méchoui organisé par Amane ; pendant toute l’année nous avons joué au poker et mis quelques sous de côté en prévision de ce festin.La fin de notre séjour approche, des postes de coopérants civils dans l’enseignement nous sont proposés, mais Patrick veut quitter ce pays car il est malade.

Ne pas rester sera un grand regret dans ma vie.Les cantines sont reparties par bateau, la Dauphine est vendue à Sid Ali et nous passons notre dernière soirée chez Nanette et Jean Claude en compagnie d’Aman.
Nous recevons le grand plateau de cuivre en cadeau de départ ; je suis contente de rentrer en France pour retrouver les miens mais très triste de tourner une page de ma vie et de quitter tous mes amis. Le lendemain, Alphonse, Nanette et Jean Claude nous accompagnent au port ; nous embarquons sur « l’AVENIR » tout un programme ! Nous quittons Alger en fin d’après midi et je regarderai les lumières disparaître petit à petit pendant bien longtemps….. Adieu l’Algérie…..Cette histoire, c’était il y a 36 ans….. Que sont devenus nos amis ?


Alphonse est devenu Evêque d’Oran et nous avons eu le grand plaisir de le voir quelques heures l’an passé lors de l’ordination du nouvel Evêque de Dijon qui est un de ces amis.Max qui avait 63 ans à l’époque est décédé depuis une vingtaine d’années.
Aman était devenu capitaine mais il s’est noyé en faisant de la plongée sous marine, et cela depuis longtemps.Monsieur et madame Akam : nous avons toujours gardé contact et chaque année j’envoyais un petit mot.
Monsieur Akam est décédé, et récemment j’ai vu par deux fois madame Akam chez son fils Kamel . Celui ci vit à Montpellier avec femme et enfants, il est français maintenant ; nous nous téléphonons de temps en temps.
Denis et Eliane sont nos amis de toujours et depuis trente quatre ans nous nous rencontrons régulièrement à Dijon ou en Normandie.
Michel et Marie Thérèse sont installés en Bretagne ; nous nous sommes perdus de vue pendant de longues années mais nous nous sommes retrouvés avec un très grand plaisir.
Robert est américain, il est marié avec une brésilienne, il a trois enfants et vit à Boston ou il est psychiatre.
Nous sommes allés lui rendre visite il y a quelques années lors d’un voyage aux Etats Unis en compagnie de nos enfants Samuel et Nicolas.
Sid Ali est venu il y a fort longtemps nous rendre visite, accompagné de sa fiancée française ; j’ai appris que depuis il avait divorcé ; il est reparti en Algérie et s’est remarié avec une algérienne.Djamel est devenu directeur d’école.Nous avons perdu de vue Nanette et Jean Claude ainsi que Sonia et Guérit ;

Sabri Moustafov et sa famille sont suisses et s’appellent Alpman ; nous nous sommes revus quelques fois mais maintenant nous n’avons plus de nouvelles ;

Semionov et sa famille sont rentrés en Bulgarie, mais avant ils ont faits un voyage en France et sont venus nous rendre visite à Dijon.



  • O rivages aimés du soleil et des dieux !Récifs rongés de sel où la mer vient s’abattre,Tremblants sous le ressac de ses flots furieux,Si blancs qu’on vous dirait d’albâtre.Grève de sable fin que rosit le couchant,Qui reçoit dans la paix les baisers de l’écume.
  • Alors que vers l’azur s’envole un dernier chantPour une étoile qui s’allume,Pampres verts des coteaux couronnés d’orangersEt de pins résineux ; vous, croupesNonchalantesQue colore au printemps la fleur de ces vergersQu’on voit escalader vos pentes ;Et toi, majestueux et troublant ChenouaDont le front plein d’orgueil se cache dans la nue,Au flanc duquel pourrait dormir AntinéaEn quelque retraite inconnue !Splendeur ! Immensité de la mer et du ciel !Rien ne peut surpasser vos soudaines colèresOu la sublimité d’un coucher de soleilDevant des ruines séculaires.C’est là Cherchell, que tu t’isoles dans l’oubliAinsi qu’en ton musée une statue ancienneQue drape fièrement la tunique au long pliMoulant son corps de patricienne.Tuiles rouges des toits qui penchent vers le port,Parfums -musc ou jasmin -s’exhalant des ruelles,Balancelles que berce une brise à ton bordDe caresses perpétuelles.Gazouillis des jardins, calices entrouverts,Fûts géants des dattiers dont les palmes s’inclinentAinsi qu’une fusée éclate en bouquets vertsQui retombent sur la colline….Place romaine au pied de qui les flots calmésMeurent dans la douceur d’un soir de clair de lune,Où la chaleur du jour ne pénètre jamais,Ni sa lumière inopportune ;Thermes d’où montaient la musique et les chœursAux applaudissements d’une foule en démenceQui tout en couronnant de lauriers ses acteursRiait de Plaute ou de Térence !Yol ! Yol ! Avais – tu fait ce rêve certains joursOù tirant leur trirème au sable de ta plage,Des marchands prirent pied sur ton sol, tour à tour.Venus de Tyr et de Carthage ?Pourtant la gloire vint sur ton front étonnéDéposer le baiser de Rome protectrice, quandDe Cléopâtre la fille SélénéUnit sa grâce à ton délice.Or, un vent de tempête et de séditionBalaya le sommet d’où on te vit descendre,Et les siècles tombant sur ta perfectionFirent sur toi pleuvoir leur cendre.Mais le ciel éternel rajeunit la beautéEt je veux, ô Cherchell, sur ta ruine sacréeCélébrer le réveil de l’antique citéLa somptueuse Césarée
René Rousseau. Cette histoire, mon histoire, je l’ai résumée afin d’en faire cadeau à mes fils Samuel et Nicolas.

Dominique Jacquemin/Cathelin _ 2oo6